Novembre 2014

“Le mieux que nous ayons à faire c’est de rêver d’un monde meilleur.

Le malheur de l’homme, c’est d’avoir trop souvent rêvé d’un monde parfait.”

Franz Bartlelt, Petit éloge de la vie de tous les jours (2009)

La sexualité est-elle un besoin ; l’orgasme est-il indispensable pour vivre ? Heureusement que non ! L’Histoire et la Science montrent que l’être humain peut se passer de toute sexualité, par contrainte ou par choix, sans que cela n’affecte son espérance de vie. Le constat est aisé, physiologiquement, la sexualité n’est pas un besoin. La réponse est différente, lorsqu’on se place sur le plan psychologique et relationnel. Si l’on admet que l’Homme est un animal social, alors il faut s’interroger sur l’impact de la privation de toute sexualité sur l’ensemble des relations avec les autres. « Je suis les liens que je tisse avec les autres. » (Albert JacquardPetite philosophie à l’usage des non philosophes, 1997). Or, le ressort qui pousse vers les autres porte un nom : le désir. Désir d’être, d’exister, d’aimer. Lorsque ce désir est sexuel, il s’agit de libido. Exprimée ou pas, la libido existe en chacun. Elle peut être réprimée, frustrée ou sublimée, mais elle existe. C’est alors qu’interviennent les deux grands fondements de l’équilibre que sont la liberté et l’autonomie. Les personnes en situation de handicap, sont privées de liberté, par défaut d’autonomie. C’est pourquoi la loi tente de compenser cette perte d’autonomie pour permettre une certaine liberté. Faut-il aller jusqu’à prendre en compte la libido des personnes en situation de handicap ? Nous pensons que oui. C’est pourquoi nous militons à l’APPAS.

Encore faut-il distinguer l’assistance sexuelle et l’accompagnement sexuel. L’assistance évoque l’action d’aider celui qui est incapable. L’assistance suppose une relation asymétrique entre un aidant-autonome et un aidé-dépendant. L’inconvénient majeur de l’assistance est de faire du bénéficiaire un assisté et d’entretenir la dépendance. L’APPAS vise un objectif plus ambitieux : l’accompagnement. Le verbe accompagner signifie littéralement se déplacer avec un être animé. Accompagner, c’est faire un bout de chemin avec l’autre. Accompagner, n’est ni infantilisant, ni paternaliste. Dans le domaine érotique, l’accompagnement sexuel ne prétend pas être LA solution, mais se propose d’être une étape du progrès au bénéfice de celui ou celle qui souhaite être accompagné. L’accompagnement se conçoit exclusivement entre adultes volontaires. L’accompagnement sexuel est un projet pensé, espéré, accepté et dans le meilleur des cas, réalisé.

Bien entendu, l’accompagnement sexuel ne peut être limité à un acte sexuel classique qui n’est parfois pas possible, parfois même pas demandé. Il peut englober toutes les formes d’expression de la libido, en passant par les textes et les images, les objets et les gestes, les mots et les silences, qui font la sexualité des hommes et des femmes libres.

« Le monde est dans ma têtemon corps est dans le monde. » (Paul Auster La Solitude du labyrinthe, 1997)

Parce que la sexualité est de tête et de corps, à défaut d’autonomie, l’accompagnement sexuel est un chemin vers la liberté.